Après l'extrème-droite, l'extrème-gauche. Cinq têtes d'affiche briguent nos suffrages : l'éternelle Arlette Laguillier, le p'tit jeune qui monte Olivier Besancenot, la coco-labo pas très rieuse Marie-George Buffet, le débonnaire insoumis José Bové et l'inconnu de service, Gérard Schivardi. Champions de la contestation anti-libérale, ils tirent à boulet rouge (normal) sur les ravages du capitalisme dérégulé et de la mondialisation économique. Les arguments varient d'un candidat à l'autre et s'ils se rejoignent sur l'analyse contextuelle, ils se différencient non tant sur les réponses à apporter que sur la façon de les apporter. Bientôt la révolution ? C'est pas gagné...
Arlette bientôt à Malibu
Ancienne employé du Crédit Lyonnais, Arlette Laguillier, 67 ans, a sans doute plus milité que vraiment travaillé. Représentant "le camp des travailleuses et des travailleurs", elle se présente pour la 6ème et dernière fois à l'élection présidentielle après ses deux bons scores en 1995 (5,2 %) et 2002 (5,7 %). Elle est devenue tellement incontournable, un personnage, que personne n'écoute vraiment ce qu'elle dit. Son immuabilité, tant par sa présence que par le contenu de son discours, l'a rendue populaire au-delà de sa propre sphère électorale (chantée par Souchon et starisée par sa marionnette des Guignols). Son parti, Lutte Ouvrière, dont elle est une des fondatrices en 1968, reste une structure obscure dirigée par Robert Barcia, dit Hardy, un chef d'entreprise soupçonné d'être lié à l'industrie pharmaceutique. Ce dernier écrira un livre racontant l'histoire de Lutte Ouvrière.
Comme pour le FN incarné par son fondateur, Lutte Ouvrière c'est Arlette et elle seule et entretient encore et toujours le mystère sur LO en choisissant de pas dévoiler son équipe de campagne. Viscéralement anti-capitaliste, elle se présente comme la seule vraie communiste, accusant (à juste titre) le PCF de "gérer le capitalisme", lequel en participant aux gouvernements socialistes a perdu son âme révolutionnaire et a légitimé des décisions très éloignées de son idéologie (exemple de la privatisation d'Air France par Gayssot).
Le problème de LO et d'Arlette Laguillier est de convaincre "les travailleurs" que le communisme n'est pas mort et que voter pour le Front National qui a su capter l'électorat ouvrier et des petits employés n'est pas une bonne solution. Mais aujourd'hui, son principal concurrent, c'est Olivier Besancenot avec qui elle a refusé de s'allier alors que leurs différences idéologiques sont minces, ce qui créé quelque peu une confusion qui pourrait leur être fatale à tous les deux.
Vivement la retraite pour Arlette, sous le soleil de Malibu !
Le facteur sonne toujours deux fois
C'est devenu lui aussi une vedette. Olivier Besancenot, 32 ans et encore une fois benjamin de l'élection, rempile en se présentant à la présidentielle après un score remarqué de 4,25 % en 2002. Titulaire d'une maîtrise d'histoire contemporaine, il a choisi facteur, un métier de lettres... Exerçant à Neuilly, la ville la plus riche de France et dirigée par un certain Sarkozy Nicolas, il est plus facilement médiatisable. Jeune, intelligent, parlant bien et, ce qui ne gâte rien dans notre société de l'image, beau gosse, Olivier ne pouvait que plaire. D'abord à son parti, la Ligue Communiste Révolutionnaire et son mentor, Alain Krivine, qui voit en lui une manière de redynamiser un parti à l'image controversée. Et puis aux jeunes fascinés par Che Guevara dont Besancenot se réclame et à son côté libertaire. Comme Arlette, il sait parler simplement mais il sait mieux qu'elle communiquer dans les médias, ce qui lui vaut de passer régulièrement au zapping sur Canal+ grâce à de petits coups d'éclats souvent préparés à l'avance.
Comme LO, la LCR refuse toute alliance de gouvernement avec le Parti socialiste. Cette stratégie "indépendantiste" pourrait ne pas avoir le même écho qu'en 2002 où les leçons de l'éparpillement des voix socialistes vers les "petits" candidats de gauche auront sans doute été retenues. D'un autre côté, c'est la seule façon à la LCR de continuer à exister, contrairement aux choix faits par le PCF et les Verts qui en affichant leurs désirs de participer à un gouvernement socialiste, prennent le risque d'être totalement atomisés.
Buffet froid
Après la déroute de Robert Hue en 2002 et ses 3,4 %, le PCF continue son entreprise d'auto-démolition programmée. Le coup de fouet viendra-t-il de Marie-George Buffet, 57 ans, candidate pour 2007 ? La carrière politique de la dame est assez banale : étudiante en histoire, elle entre au PCF en 1969, puis au bureau national de l'UNEF. Elle bosse un peu comme secrétaire de commune puis est rapidement embauchée par le Parti comme secrétaire de la fédération des Hauts-de-Seine. Elue en 1977 comme adjointe au maire de Châtenay-Malabry (92), elle se fait remarquer par Bob (Hue coco) qui l'a fait rentrée au Comité central puis au bureau national en 1987. A peine élue députée du 9-3 en 1997, elle entre au gouvernement de Jospin comme ministresse de la Jeunesse et des Sports et se fait connaître par sa pseudo-lutte contre le dopage et surtout profite de la victoire des footeux en 1998 pour la Coupe du Monde dont elle chapeaute le déroulement. En 2001, elle devient la patronne du PCF et laisse Bob, son ancien mentor, aller au casse-pipe à l'élection présidentielle de 2002.
Marie-George est une maline. Elle a compris que le communisme tout seul n'arriverait à rien. Après avoir collaboré avec les socialistes pendant 5 ans et le résultat électoral calamiteux de 2002, il fallait changer l'image du PC. Elle s'est alors tournée vers le milieu militant associatif (mouvements de chômeurs, défense du droit d'asile, DAL, etc.) et a joué l'ouverture avec les autres partis de gauche. Lors du référendum sur le TCE, elle a financé les meetings unitaires permettant à la gauche anti-libérale de parler d'une seule et même voix. La victoire du non l'a poussée à rééditer cette stratégie pour la campagne présidentielle. Sauf qu'elle a pris ses anciens partenaires pour des benêts de compétition qui voulaient bien de ses sous et de son soutien mais pas de son leadership. Résultat des courses : le buffet de Marie-George risque d'être bien froid le 22 avril prochain...
Gentil coquelicot
C'est le symbole choisi par José Bové pour faire campagne car c'est une fleur, donc inoffensif, et surtout un marqueur de pollution. Une sorte de tacle aux Verts et à leur fleur de tournesol. L'entrée de José Bové dans la campagne n'est pas banale. Après le succès de la campagne des "anti-libéraux" contre le non au TCE, les luttes de pouvoir politique ont déchiré les espoirs d'une candidature unitaire au scrutin présidentiel, chaque camp cherchant à tirer la couverture vers soi. Il aura fallu le lancement d'une pétition sur Internet et le recueil de 40 000 signatures en deux semaines demandant à Bové de se présenter au nom des alter-mondialistes pour que ce dernier accepte en déclarant que "cela faisait longtemps que ça lui démangeait dans le bas-ventre"... Surtout sa possible incarcération après sa condamnation pour le fauchage de maïs OGM a jeté sur lui les feux médiatiques qui l'ont plus servi que desservi.
Moi, j'aime bien José. On a d'abord des points communs : il a vécu à Talence où d'ailleurs il est né et à Bazas où il a été caché par des amis pour échapper au service militaire. Il a une gueule sympa, il dit ce qu'il pense (ou presque...), il est nature, rigolo, vrai écolo et contrairement à Voynet, il n'a pas envie de s'associer au PS pour avoir une tranche de pouvoir ou des élus. En plus, il est le seul candidat à maîtriser parfaitement l'anglais et l'espagnol, c'est un vrai internationaliste ou comme on dit "un citoyen du monde". Même si on entend peu parler de lui dans les médias hormis à la rubrique judiciaire, son audience est réelle, notamment chez les intellos de gauche, les enseignants, les écolos "nonistes" du TCE mais aussi auprès des nombreux précaires jeunes et moins jeunes. Le problème pour Bové, c'est qu'il est arrivé un peu tard dans cette campagne et que tant son programme que ses idées restent assez brouillonnes. A l'image de son équipe de campagne où domine l'amateurisme, notamment dans l'organisation de ses meetings (j'en ai vu un à pisser de rire sur la chaîne parlementaire dont j'aimerais bien trouver la vidéo pour la mettre en ligne : c'est filmé par un caméraman parkinsonnien, les micros ne fonctionnent pas, le projo sensé éclairer la scène est tellement puissant qu'il aveugle tout le monde, bref du Groland...)
Avec Schivardi, ça chie pardi !
Vous ne le connaissiez pas ? Moi non plus. Pas besoin de trop s'étaler sur ce brave homme, maire de Mailhac, une commune rurale du Minervois et candidat du Parti des Travailleurs, parti qui a fait l'objet de suspicions, notamment lorsque Lionel Jospin, en 2001, nia tout lien avec cette organisation dont il a pourtant été membre dans sa jeunesse (il faut dire que le parti des travailleurs est lui-même un peu compliqué à comprendre car éclaté en plusieurs courants).
La tronche d'alcoolo de Schivardi et son accent roccailleux du midi le rendent pas franchement avenant pour les urbains, contrairement à son directeur de campagne, Daniel Gluckstein, qui lui-même s'était présenté en 2002. Ancien membre du PS, il est élu conseiller général de l'Aude en 2001 contre le candidat officiel du PS et contre "l'intercommunalité forcée", accusée de faire perdre aux petites communes leur indépendance. Se définissant comme le représentant des maires de France, il a dû changer son slogan et ses affiches suite à la plainte légitime de l'Association des Maires de France. Son leitmotiv de campagne : l'Europe, fossoyeur de la France. Un souverainiste de gauche défenseur des services publics et de la ruralité. Dans cette optique, son principal concurrent est le mouvement Chasse, Pêche, Nature et Traditions mais avec un fond idéologique bien plus affirmé (les chasseurs doivent regretter la gouaille du béarnais Jean Saint-Josse et le pâlot Frédéric Hihous risque de pêcher bien moins de voix que son prédécesseur).
A vos Ché !
Hormis Bové qui tirera peut-être le mieux son épingle du jeu, les autres candidats anti-libéraux vont se faire ramasser. La France est un pays bien trop conservateur pour envisager une révolution. A la limite, de velours, comme dans les pays d'Europe de l'Est (où la CIA a financé et accompagné les mouvements anti-communistes pour renverser les régimes politiques dictatoriaux en place). Un candidat se positionne aujourd'hui clairement sur ce créneau. Il s'appelle "Ernesto Gai Bayrou" et il prône "la révolution tranquille", après sans doute que Sarkozy ait abandonné son premier slogan de campagne "la rupture tranquille" (accoler deux mots au sens opposé, on appelle ça un oxymore). Bayrou serait-il le Gandhi français ? Réponse dans le prochain pâté de campagne avec également pour terminer ce politic show les vedettes Sarko-cowboy et Ségo-gogirl ! Venez nombreux !
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9 commentaires:
bon alors bove dimanche prochain?
n'empêche sarko il les a ses attentats alkaida label rouge...
la responsabilité à qui?
coincidence ou préméditation?
bon à part ça moi j'ai complètement décroché mais je vais donner ma voix à Bové je respecte.
ciao
caz
Bon, moi aussi j'ai dû décrocher : c'est quoi cette histoire d'attentats à la kaïda ? Où , quand ? C'est le truc qui a fait boom à 13h aujourd'hui ? ;)
Sinon, je plussoies ton constat/analyse des vaines divisions de "vraie gauche".
P'tite question quand même : pourquoi des urbains classe moyenne travaillant dans le tertiaire (si je dit 50 % des français, je suis pas loin) voteraient-ils pour des candidats qui se disent représenter les ouvriers (24 % des français selon l'INSEE, et au train où ça va...) ou les ruraux (une poignée de billes)?
@caz
Les attentats d'Alger (qui ont eu lieu un "11" comme à NYC, Madrid, Casablanca...) n'ont pas eu l'effet espéré, c'est-à-dire créer un climat de psychose qui aurait pu (du ?) gagner la France, avec un discours entendu sur l'air de "en visant l'Algérie, les islamistes intégristes ont envoyé un signal à la France". Sauf qu'on voit mal ce que ces "fous d'Allah" auraient à reprocher à la France. Il est clair que ces attentats portent la marque Al CIA (la mouvance terroriste d'Afrique du Nord est totalement noyautée et entraînée par la CIA et le Mossad) et ce sont donc les néocons qui ont plutôt envoyé un "message de soutien" à leur allié Sarkozy. Heureusement, Chirac et les militaires veillent et ont renforcé leurs contrôles Vigipirate dans les lieux dits "sensibles" (quartier de la Défense par exemple).
@marco
La peur de perdre son boulot est peut-être une raison qu'ont ces "Français moyens urbains" de se tourner vers les candidats qui en défendant la classe ouvrière et les petits paysans montrent une certaine compassion pour ceux dont le quotidien est difficile et l'avenir pas très rose. Aujourd'hui, les CDI ne garantissent plus la stabilité de l'emploi et même les fonctionnaires craignent pour leur job. Le libéralisme (et pas seulement la mondialisation) représente un danger clairement ressenti par ceux qui bossent, par le camp des "travailleurs" et le discours des "petits" candidats entre en résonance avec ce sentiment. Les "gros" candidats parlent tous de la "valeur travail" mais omettent de préciser que ce sera "chacun pour sa gueule" et que seuls les mieux préparés pourront survivre. Comme aujourd'hui, quoi. Mais en pire...
d'après le dernier sondage de Hergè le professeur Tournesol et la Castafiore sont qualifiés pour le second tour.
Gaston
Eh Gaston, y'a le téléphon qui son et y'a jamais person qui répond !
1h00 du mat ici, je reviens demain essayer de lire ton truc.
De toutes façons, je vote pas et je donne ma proc à personne.
Démerdez vous sans moi...
PS: t'as trouvé ce que l'état fait des empreintes digitales que tu dois laisser quand tu demandes une carte d'identité??
@vdix
Mon intention dans cette présentation des candidats est de montrer que la démocratie est morte, tuée par le capitalisme mondial dérégulé. Cette élection présidentielle est une mascarade où l'on essaye de nous faire croire (encore) que le vote est important et qu'il va décider de notre avenir. Alors que tout est déjà écrit. C'est comme lorsque sur un grand projet (une autoroute, projet nucléaire ITER ou EPR), on fait des consultations où on invite le public à s'exprimer alors que tout est décidé à l'avance en haut-lieu. Donc ne pas aller voter est pour moi un acte de résistance.
Concernant le relevé des empreintes digitales et le stockage des données, ils s'inscrivent dans les multiples lois anti-"terroristes" votées par le Parlement français. Ce ne sont qu'un premier pas avant les relevés biométriques imposés par les Américains. L'adoption de ces restrictions des libertés publiques est très inquiétante car la frontière avec la dictature est désormais très mince.
Le vrai courage aujourd'hui c'est de dire non. Mais je crains que nous ne soyons bien seuls...
Et j'ajouterais que de ne pas participer à ce scrutin ne signifie pas ne pas s'y intéresser. La preuve !
Je crois vous l'avoir déjà dit, M le directeur, mais écrire "... la bourgeoisie (petite et grande) qui s'enrichit sur le dos des travailleurs grâce aux dividendes des actions qu'elle possède dans les entreprises du CAC40..." ne veux rien dire.
C'est aussi crédible que d'annoncer que "le bilan de l'URSS en Afghanistan est globalement positif"
Sinon, pour ton info (tu t'en brosse les genoux je sais), je me suis tapé comme à chaque élection TOUTES les professions de (ayez) foi (en moi). Sorte d'obligation intellectuelle que je m'impose (je sais, c'est très con).
Petit classement perso :
- le fion d'or go's to : Nihous et Ségo (t'as raison, son programme est vide de sens).
- le chirac de papier (qui récompense comme chacun le sais la plus belle preuve d'hypocrisie) : Le Pen. D'ailleurs, il en dit le moins possible, sais-ton jamais.
- le Temesta de bronze go's to : Laguiller
- la Extasie-cup go's to : Laguiller encore, avec ses 2 millions de logements en 2 ans sans les bétonneurs privés (que chacun prépare sa pelle, son seau et son litron de flotte si elle est élue).
- le M'n M's du plus bel effort go's to : Bové.
@vdix : comment elle va notre si belle et humide bouche des îles :) ?
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